Depuis quelques semaines, nous sommes au premières loges pour observer les Spatules blanches migrer. C’est l’occasion de regarder si elles sont baguées et, pour celles qui le sont, lire les bagues. Nous pouvons ensuite retrouver le bagueur grâce au type de code utilisé (bagues colorées, code alphanumérique…) et lui transmettre l’observation. Il l’intègre alors au registre de l’oiseau, son “CV”, qu’il nous transmet en retour. Nous pouvons alors savoir où est né l’oiseau, en quelle année et par où il est passé…

Prenons l’exemple de GGfa/LGL. Ce nom (très glamour) est en fait le code constitué par les bagues colorées. Les majuscules correspondent aux couleurs : G pour Green (vert), L pour Lime (vert clair). Le « f » minuscule signifie flag (drapeau) ; collé au G qui le précède, cela signifie que la deuxième bague verte a un drapeau, un bout de bague qui dépasse nettement (comme la bague vert clair de la spatule en photo ici). Le « a » correspond à la bague métal sur laquelle sont inscrits l’identifiant numérique de l’oiseau (ici, 268857) et le nom du muséum du pays où l’oiseau est bagué (ici, muséum Berlin).

Grâce au retour du CV par le bagueur, nous savons que l’oiseau a été bagué poussin le 03/06/2011 sur l’île allemande d’Oland, près de la frontière avec le Danemark. Après les informations sur le baguage en lui-même, le CV contient la liste de tous les endroits où la spatule a été observée. Cela permet de retracer les grandes lignes de ses voyages, au fil des observations.

Ainsi, nous savons qu’au début du mois du juillet, GGfa/LGL a quitté l’île qui l’a vue naître pour rejoindre le continent. Elle est restée là-bas pendant au moins 1 mois. En octobre de la même année, elle est vue dans le Morbihan soit environ 1 100 km plus loin. Encore jeune, elle ne ressent pas le besoin de se reproduire. Elle y reste donc environ 1 an.

Pendant les quelques mois du printemps 2013, elle n’a pas été observée. Elle est certainement partie prospecter pour un éventuel futur nid. Peut-être même qu’elle s’est reproduite. Ce qui est sûr, c’est qu’en juillet 2013, elle est observée de nouveau en Allemagne, sur le même site que lorsqu’elle a quitté son île natale. Elle y reste au moins jusqu’en septembre.

Le 28 mars 2014, elle est de nouveau observée dans le Morbihan. Y a-t-elle passé l’hiver ou est-elle seulement passée en migration ? Difficile à dire. Le 17 avril, elle est observée 1 000 km plus loin en Allemagne. Elle répète ce schéma pendant plusieurs années, alternant entre des passages dans le Morbihan et le nord de l’Allemagne où elle s’arrête chaque année.

En 2017, son site de reproduction est enfin trouvé ! Elle est observée sur son nid sur l’île Hoje Sande, située dans un fjord à l’ouest du Danemark. Cette île se situe 130 km plus au nord du site où elle est née. On voit bien le grand rayon de dispersion des jeunes. Cela évite entre autres les problèmes de consanguinité et de surpopulation. En juillet, elle est retrouvée sur son site de halte en Allemagne. On peut alors supposer que les printemps précédents, elle nichait déjà sur le même site.

En novembre 2017, elle est observée en Espagne, près de Séville ! Cela fait environ 2 400 km depuis son site de reproduction.

Durant les années suivantes, elle poursuit ses aller-retour. Elle est souvent observée aux mêmes endroits. On peut noter une grande fidélité (ou une tradition ?) à certains sites propices pour les haltes ou l’hivernage.

En septembre 2019, elle est vue au Parc pour la première fois où elle passe quelques jours avant de repartir.

Cette année à nouveau, elle est observée au Parc. Nous avons hâte de recevoir son CV actualisé et de voir les voyages qu’elle a faits depuis la dernière fois !

Récemment, nous avons aussi eu le retour d’une autre spatule baguée en Espagne en… 1996 ! En revanche, c’est une grande timide. Elle n’a été observée que 10 fois, dont 8 fois en Espagne (entre février et mars) et une fois en Mauritanie (en décembre), où elle passe probablement l’hiver. Son observation au Parc durant la période de migration indique qu’elle niche plus au nord, sans que nous puissions toutefois être plus précis.

En retraçant ainsi les parcours des oiseaux, on peut en apprendre beaucoup sur leurs déplacements et les dynamiques de populations. On peut aussi identifier les zones propices aux haltes, hivernages et reproductions.

Texte : Quentin Libert / Illustration : Gabriel Le Du

Lors des grandes marées, outre de nombreux limicoles, des milliers d’Huîtriers pie se réfugient sur le Parc qu’ils utilisent comme reposoir. Les vasières de la baie de Somme sont recouvertes par la mer et ne sont plus accessibles comme réservoir de nourriture riche en vers marins et coquillages. Posés sur les bancs, ils attendent patiemment le reflux. 

Mais point de temps perdu, c’est le moment indispensable pour faire sa toilette et entretenir le plumage en pleine mue pour les adultes, ou bien dormir d’un sommeil partiel, toujours un œil en éveil pour repérer un prédateur potentiel venant de la terre ou des airs. Les reposoirs de marée haute sont rares et doivent assurer une totale tranquillité durant ces quelques heures de repos. À marée basse, la quasi-totalité du temps sera alors consacrée à la recherche de nourriture. 

C’est alors l’occasion pour les guides naturalistes de noter la proportion de juvéniles et d’adultes pour avoir une impression du succès de la reproduction des populations plus au nord, mais aussi de repérer les oiseaux bagués. En effet, quelques individus sont munis de bagues de couleur bien visibles à la longue-vue portant souvent des lettres et des chiffres. Lors du dernier épisode de grandes marées du 2 au 5 août 2023, 6 oiseaux bagués ont été observés. Tous viennent des Pays-Bas.

  • RB-WCCP bagué plus de 3 ans à Middelburg (Oude) en Zélande le 19 juin 2013. Il avait déjà été observé le 3 août 2015 et le 12 août 2018 sur le reposoir du Parc. Tous les autres contacts ont eu lieu en Zélande, dans sa région de reproduction.
  • BLP-C90A bagué poussin le 3 juin 2021 à Bunschoten. Il avait déjà été observé le 25 juillet 2021 sur le reposoir du Parc et non noté ailleurs.
  • RB-WECZ bagué plus de 3 ans le 30 mai 2021 à Zoetermeere, et observé en août 2022 et mars 2023 sur sa zone de nidification.
  • BRY-W4RT bagué poussin le 9 juin 2018 au polder de Nieuwe Driemans. Le 1er et 5 avril et du 19 décembre 2021 au 28 janvier 2022, il est noté en baie de Saint-Brieuc, tout comme du 15 août au 28 novembre 2022.
  • LG-BJOS bagué poussin le 11 juin 2010 à Neeltje en Zélande. Toutes les autres observations de cet oiseau ont été faites aux Pays-Bas aussi bien en période de reproduction qu’en hivernage.
  • BRY-W4R3 bagué plus de 3 ans le 27 mai 2017 à Nieuwe Driemanspolder, Zuid Holland. Toutes les autres observations de cet oiseau ont été faites aux Pays-Bas de mi-février à fin juin.

Les observations d’oiseaux de plus de 10 ans ne sont pas rares puisqu’un Huîtrier pie peut vivre plus de 35 ans.

Les Hollandais ont intensifié les opérations de baguage de cette espèce qui connaît une baisse drastique de sa population nicheuse depuis 2000, due tant à la diminution de la ressource alimentaire dans les estuaires, qu’à l’intensification des pratiques agricoles sur les polders, provoquant une baisse de la productivité en poussins ; à cela s’ajoute la dégradation des conditions des oiseaux en hivernage, notamment en France, où on note une forte mortalité. Cette tendance s’inscrit dans un contexte global en Europe (-20% entre 1997 et 2007).

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Pierre Aghetti

Une mystérieuse machine a fait son apparition sur une digue du Parc, entre les postes n°10 et n°11. Mesurant près de 2 mètres de hauteur pour 150 kg, elle ne passe pas inaperçue. Mais que fait donc cette installation en pleine Réserve naturelle ? Il s’agit tout simplement d’un radar ! Pour flasher les visiteurs trop pressés pris en excès de vitesse ? Pas exactement, même si, rappelons-le, la lenteur est une qualité grandement conseillée pour observer la nature… 

Cet appareil est en fait un radar ornithologique installé dans le cadre de MIGRATLANE, un programme financé par le Ministère de la Transition Écologique et porté par l’Office Français de la Biodiversité. Il a pour objectif de mieux comprendre la migration des oiseaux terrestres et la répartition des oiseaux marins à l’échelle des façades Atlantique et Manche. Le programme, qui se déroulera entre 2022 et 2027, est basé sur l’acquisition et l’analyse de données à l’aide de techniques complémentaires : suivis télémétriques (balises GPS/GLS installées sur les oiseaux), suivis acoustiques et visuels (enregistreurs acoustiques et réseau d’observateurs), suivis aériens (observations visuelles depuis un avion) et enfin suivis par radars (ornithologiques et météorologiques). Il est mis en œuvre par différentes structures dont le MNHN (Muséum National d’Histoire Naturelle), le CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), le GISOM (Groupement d’Intérêt Scientifique Oiseaux Marins), Météo-France, ou encore Biotope. 

La Baie de Somme est l’un des 4 sites choisis pour mettre en place ce radar, du fait de son intérêt pour les oiseaux migrateurs. L’étude, menée durant 1 à 3 ans en fonction de la pertinence des données recueillies, permettra de suivre les migrations avifaunistiques. Des données sur les chauves-souris ou les mouvements d’insectes pourront également être récoltées et transmises aux responsables d’autres programmes de suivis. 

Comment ça marche ? Le radar, autonome, fonctionne en continu : il mesure la fréquence des battements d’ailes, l’altitude, la vitesse et la direction de vol, ce qui permet non seulement de décrire au mieux les mouvements migratoires des oiseaux, mais aussi de classer les cibles détectées en grands groupes : passereaux de petite taille, passereaux de grande taille, oiseaux d’eau, oiseau de grande taille, etc.

À l’issue du programme, les équipes scientifiques de la Réserve naturelle et du Syndicat mixte Baie de Somme récupéreront les données, ce qui devrait permettre de mieux adapter les mesures de gestion.

Texte : Marion Mao, Cécile Carbonnier / Illustration : Benjamin Blondel

Fin juin a débuté la période de baguage des jeunes Cigognes blanches par les guides naturalistes du Parc du Marquenterre. Un programme du Muséum de Paris (Centre de recherches par le baguage sur la biologie des populations d’oiseaux) est mis en place pour suivre la population en expansion de ce grand échassier en Hauts-de-France et en Seine-Maritime. En Picardie, une soixantaine de couples nichent cette année. La quasi-totalité d’entre eux est localisée sur notre littoral et en basse vallée de la Somme (30 couples) et de l’Authie (18 couples). Des couples s’installent aussi maintenant de plus en plus dans le Pas-de-Calais, et même dans le Nord (10 couples). Les Hauts-de-France, terre de Cigognes !

Naturellement dans notre région les couples de Cigognes blanches installent leur nid au sommet des grands arbres fourchus souvent morts, voire parfois sur les pylônes électriques. Il n’y a pas de tradition de nidification sur les bâtiments. Ces nids, très hauts, sont inaccessibles au baguage, comme bien entendu les 11 nids de la héronnière. La plupart des poussins de cigognes sont ainsi bagués sur les nids construits sur les plateformes disposées à leur intention… mais aussi pour faciliter le travail des ornithologues bagueurs. Ils sont bien accessibles avec une échelle ou un engin élévateur. À l’arrivée du bagueur, les jeunes font les morts au fond du nid. Leurs yeux sombres, révulsés, accentuent encore le stratagème face à ce prédateur potentiel. L’immobilisme évite en effet bien souvent le risque d’attaque déclenchée par le mouvement. 

Les poussins rondouillards (parfois plus de 3,5 Kg !) sont bagués entre 6 et 7 semaines. Les plumes noires des rémiges ont bien poussé, et les plus âgés se mettent debout et bougent ces ailerons encore courts et flasques. Les jeunes sont descendus du nid pour être bagués au sol en toute sécurité. Ils sont munis obligatoirement d’une bague métal du Muséum de Paris avec un numéro unique pour chaque oiseau. Les guides du Parc posent également une grosse bague plastique verte avec 4 grosses lettres en majuscule. Les trois jeunes sur la plateforme entre le poste 11 et 12 sont porteurs de ces bagues.

On sait grâce à ces bagues que tous les jeunes nés dans notre région partent hiverner en Espagne (notamment autour de Madrid), au Portugal (région de Faro) mais aussi jusqu’en en Afrique (Mauritanie, Mali, Niger…). On connaît aussi parfaitement la route empruntée par nos oiseaux qui évitent la Bretagne et trouvent des arrêts favorables en Mayenne ou dans les Deux-Sèvres. Certains rares oiseaux passent aussi par le sud-est (Champagne, Var) regagnant l’Espagne par le Languedoc-Roussillon. C’est généralement au bout de deux ans qu’ils reviennent en Europe mais de plus en plus de cigognes reviennent le printemps suivant. Quelques-uns rejoignent leur secteur de naissance mais la majorité part nicher bien loin de leur lieu de naissance. Des jeunes nés au Parc du Marquenterre nichent maintenant en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, Vendée, Loire-Atlantique et même… à Colmar pour un individu !

A l’inverse, sur le même site protégé du Marquenterre nichent des cigognes nées en Belgique, aux Pays-Bas et surtout originaires de Normandie où les effectifs atteignent aujourd’hui plus de 200 couples notamment dans la Manche, l’Orne et le Calvados !

Les cigogneaux sont pesés, mesurés (bec, ailes, tarses…). Deux plumes sont prélevées pour des analyses génétiques en laboratoire, permettant de connaître le sexe, pour déterminer des orientations migratoires et de fixation entre mâles et femelles. En 2022, la sexe ratio des jeunes était équilibré.

La Cigogne blanche se porte maintenant tout de même bien dans notre région. Mais n’ayons pas la mémoire courte. En 1979, seulement 11 couples nichaient encore dans toute la France (contre 7000 aujourd’hui !) où l’espèce a failli s’éteindre ! Les conditions atmosphériques notamment printanières, la chute des nids sur les arbres morts, le manque de nourriture sont des causes naturelles de régulation de l’espèce. Bien des sites sont encore potentiellement favorables à l’espèce, notamment dans les grandes vallées intérieures picardes. Michel Jeanson, fondateur du parc du Marquenterre, qui a voué une grande partie de sa vie à la réintroduction de cette espèce, serait sans nul doute bien heureux de ce résultat.

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Eugénie Liberelle, Raphaële Thilliez

Rondouillard, gros yeux noirs, hautes pattes fines, l’air effronté… Mais quel est donc cet oiseau ? Il a tout d’un Rougegorge familier : la forme générale, ainsi que les gros yeux facilitant non seulement la recherche de la nourriture en sous-bois, mais aussi la migration nocturne. Et pourtant il est bien terne, tout moucheté de beige roussâtre. 

Les juvéniles de cette espèce ont en effet ce plumage qui passe inaperçu et ne déclenche pas les agressions territoriales des adultes qui ne supportent pas une autre poitrine orange sur leur “domaine”. D’ailleurs, mâle et femelle chantent chez cette espèce particulièrement territoriale. Les jeunes vont porter ce plumage “pacificateur” durant 5 à 7 semaines. Après leur mue post-juvénile en fin d’été, ils verront arriver une teinte orangée sur leur poitrine. Et alors là, plus question d’être visible sur le territoire des parents ! Pendant ce temps, la femelle adulte aura le temps d’entreprendre une deuxième couvée. Des cas rares de troisième ponte ont déjà été signalés. 

Il faut dire que la mortalité des juvéniles chez cette espèce est particulièrement importante en migration comme en hivernage. L’espérance moyenne de vie tourne autour de 15 à 24 mois. Comme nombre de passereaux, les individus de plus de 5 ans sont rares, même si les “vétérans” peuvent atteindre 10 à 11 ans

Le baguage montre sur le Parc que bien peu d’oiseaux sont retrouvés l’année suivante dans le secteur de la mangeoire en hiver ou au fond des parkings, où une station de baguage est active de fin juillet à novembre ; pourtant les adultes sont très fidèles à leur lieu de reproduction, contrairement aux jeunes oiseaux qui ne reviennent jamais sur leurs sites immédiats de naissance (vue la tolérance des parents… on les comprend !) . En Allemagne, sur 350 jeunes bagués au nid entre 1992 et 1995, aucun n’y a été observé l’année suivante, alors que 80 à 90% des adultes sont revenus une deuxième fois y nicher.

Texte et illustration : Philippe Carruette

Nous vous parlions il y a quelques jours de Y-TTA9, une Mouette rieuse polonaise venue faire escale sur le Marquenterre. Continuons de voyager en suivant cette fois les Mouettes mélanocéphales !

Les premières jeunes mouettes commencent à prendre leur envol sur les deux colonies du Parc. C’est aussi le cas dans toute l’Europe, et la dispersion des adultes et immatures débute avec la visite de tous les pays d’Europe – les voyages forment la jeunesse ! Avec la baisse des niveaux d’eau, les bancs de sable apparaissent, et nous permettent à nouveau de lire les bagues couleur, point de repère migratoire invisible dans la végétation haute des îlots de nidification. Ainsi nous pouvons nous rendre compte du côté international de nos “banales” mouettes.

  • H4NU : Mouette mélanocéphale porteuse d’une bague rouge, baguée poussin le 12 juin 2021 à Hadju-Bihar en Hongrie, et observée au Parc le 9 avril 2023 ; 
  • HOY5 : Mouette mélanocéphale porteuse d’une bague rouge, baguée à Bugyi également en Hongrie, et notée au Parc le 17 avril 2023 ;
  • A3LC : Mouette mélanocéphale porteuse d’une bague jaune, baguée poussin sur les gravières de Rehbach près de Leipzig en Saxe dans l’est de l’Allemagne le 13 juin 2022, et observée au Parc le 13 juin 2023 (on lui a souhaité bon anniversaire !) ;
  • AKNE : Mouette mélanocéphale porteuse d’une bague jaune, baguée femelle adulte plus de 3 ans le 19 mai 2021 à Steinkirchen près de Niedersachsen en Allemagne, et observée au Parc le 11 et 13 juin 2023 ; le 31 août et 14 novembre elle était à Cork en Irlande et le 21 novembre 2022 à Pentrez dans le Finistère

Sans oublier les oiseaux bagués en Belgique, au Polder Sébastopol sur l’île de Noirmoutier, sur la réserve de Oye Plage dans le Pas-de-Calais…

Alors une mouette certes, mais qui a vu bien du pays… et mérite d’être regardée avec attention et admiration !

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Alexander Hiley

Bien qu’elles soient visibles toute l’année chez nous, les Mouettes rieuses migrent. Ce sont surtout les populations nichant dans l’est et le nord de l’Europe qui vont le plus bouger. Ces régions deviennent inhospitalières en hiver et obligent les oiseaux à partir pour trouver de la nourriture. Elles partent alors vers l’Europe de l’Ouest ou l’Afrique du Nord, où le climat océanique voire méditerranéen leur permet de trouver de la nourriture même en hiver.

Ces mouvements de populations sont connus essentiellement grâce au baguage. De nos jours, les Mouettes rieuses sont nettement moins baguées qu’avant. Les scientifiques estiment désormais bien connaître cette espèce et concentrent leurs efforts sur d’autres espèces (comme la Mouette mélanocéphale, par exemple). Néanmoins, quelques pays européens continuent de les baguer. Ainsi, une Mouette rieuse baguée a pu être observée le 4 juin 2023 au poste 3. Mieux, la bague jaune a pu être lue, ce qui n’est pas si facile depuis ce poste : il y était inscrit TTA9 (on note alors Y-TTA9, Y pour « yellow »).

Puis l’information a été transmise au bagueur. Il peut être retrouvé grâce à la couleur de la bague et au type de code utilisé (nombre des symboles, lettres et/ou chiffres par exemple). Le bagueur nous a alors renvoyé le C.V. de la mouette en question, c’est-à-dire les informations relatives à son baguage et aux observations faites depuis. On a ainsi pu apprendre que cet oiseau a été bagué poussin le 20 juin 2022 en… Pologne ! Il s’agit de la première observation de l’oiseau depuis qu’il a été bagué. Il est donc difficile d’établir un tracé précis de son parcours durant l’année passée. La donnée reste toutefois très intéressante.

Il faudra plusieurs années pour qu’une Mouette rieuse soit mature sexuellement. Durant son “adolescence”, elle va beaucoup vagabonder, entre lieu d’hivernage et possible future zone de reproduction. Elle va inspecter plusieurs colonies jusqu’à trouver celle qui lui conviendra. Cela explique sûrement la venue de cette mouette polonaise sur le Parc.

Texte : Quentin Libert / Illustration : Philippe Carruette

Ces derniers jours, la migration bat son plein ! Beaucoup d’oiseaux sont observés en stationnement sur le Parc : entre 100 et 200 Chevaliers gambettes, une dizaine de Chevalier aboyeurs, quelques Chevaliers arlequins sont visibles chaque jour. D’autres espèces plus anecdotiques peuvent être aperçues, telles que des Combattants variés ou les Bécasseaux variables. Ces limicoles regagnent leurs zones de reproduction plus nordiques ; certains remonteront jusque dans le cercle polaire, comme les Pluviers argentés !

Cela fait beaucoup d’oiseaux sur le Parc, mais il ne s’agit que d’un petit échantillon comparé à ce que l’on trouve en baie !

D’autres espèces se font en revanche plus rares, c’est le cas notamment des Barges à queue noire. Un peu plus d’une centaine d’individus ont passé l’hiver sur ici. Après les avoir vues progressivement acquérir leur plumage nuptial roux, elles sont rapidement parties vers leur destination de reproduction : l’Islande. Quelques-unes, encore peu colorées, sont toujours présentes.

La semaine du 24 avril a été importante pour la migration des sternes. Plusieurs individus de Sternes caugek et pierregarin ont été observés sur le Parc en halte. Mais c’est en mer que les passages ont été les plus impressionnants. Quelques courageux spotteurs du Cap Gris-nez (dans le Pas-de-Calais) ont vu plus de 12 000 Sternes pierregarin le lundi 24 avril et plus de 17 000 le jeudi 27, ce qui constitue le record de passage journalier de cette espèce sur ce haut lieu de suivi de migration !

Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez consulter le site : https://www.trektellen.org/. Il s’agit du site de référence où les comptages de migrations bénévoles sont transmis dans le monde entier.

Texte : Quentin Libert / Illustration : Alexander Hiley