Cette “écume” couleur blanc-crème déposée sur les bords des plans d’eau, et que l’on retrouve beaucoup sur les plages, est due au phytoplancton, plus précisément à une algue nanoplanctonique du genre Phaeocystis. Elle est également appelée “vert de mai”, en référence à son apparition au printemps, et à la couleur de l’eau.

Ces microalgues se regroupent en colonies de tailles volumineuses (de 10 µm à 3 mm), et s’englobent dans un mucus protecteur : ainsi, elles sont protégées contre le zooplancton – les copépodes par exemple, qui sont amateurs de phytoplanctons. Sans prédateur à l’horizon, Phaeocystis peut donc se développer très rapidement.

Mais comment ces algues, mesurant seulement quelques micromètres, peuvent créer de grandes étendues de mousse ?

Après avoir épuisé les nutriments nécessaires à son développement, la colonie se déforme et se désintègre : à la mort de celle-ci et avec une eau agitée, le mucus est émulsionné telle une mayonnaise. Le phénomène est accentué par l’intensité du remous des vagues et est déposé en grandes quantités sur les plages selon la force du vent ; la mousse ainsi formée et accumulée sur le sable peut atteindre plus d’un mètre de hauteur !

Sur les 6 espèces de Phaeocystis existantes, 3 sont capables de former de grands blooms * : Phaeocystis antartica (en océan Arctique), Phaeocystis pouchetti (dans les eaux froides de l’Arctique) et Phaeocystis globosa (en mer tempérées comme la mer du Nord).

Cela reste un phénomène naturel récurrent connu depuis longtemps, mais qui peut être accentué par les activités humaines et l’accumulation de nitrates et de phosphates dans l’eau.

* Bloom planctonique : prolifération du phytoplancton

Texte : Eugénie Liberelle / Illustrations : Cécile Carbonnier, Eugénie Liberelle, Nathanaël Herrmann

 

L’Amaryllis (Pyronia tithonus) est un petit papillon diurne aux ailes orange et marron. Les mâles, de plus petite taille, se reconnaissent facilement à la bande transversale sombre sur la partie orangée de l’aile. Il est régulièrement observé sur le Parc, mais plutôt tardivement, à partir de juin jusqu’en septembre. 

Posé, il garde toujours les ailes bien ouvertes, mettant en évidence les deux ocelles noirs dans lesquels on distingue deux points blancs. Leur aspect d’yeux peut ainsi décontenancer un prédateur l’espace d’un instant : ce bref moment est suffisant pour que le papillon prenne rapidement son envol. 

L’Amaryllis est peu exigeant et pond sur les graminées des prairies (fétuque, pâturin, dactyle…). L’adulte cherche sa nourriture sur la plupart des plantes à fleurs. Ce papillon hiverne à l’état de chenille.

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Alexander Hiley

À l’entrée du Parc, sur les pelouses dunaires rases – dunes grises intérieures – on peut rencontrer une bien étrange plante : l’Orobanche du gaillet (Orobanche caryophyllacea). Elle a l’aspect d’une tige morte aux couleurs marron miel, du fait que ses feuilles sont réduites à des écailles triangulaires. Et elle n’est jamais verte, puisque que comme toutes les orobanches, c’est une plante qui ne synthétise pas la chlorophylle. 

Elle a en effet perdu son autotrophie, c’est-à-dire la capacité de puiser ses éléments nutritifs dans son seul milieu naturel, et doit se développer aux dépens d’une autre plante hôte. Les petites graines d’orobanche sont très nombreuses et émettent après la germination une pousse à l’aspect de racine, qui se fixe rapidement sur celle des Gaillets – souvent croisettes ou jaunes dans les dunes – pour prélever les indispensables éléments nutritifs.

Pour se faire néanmoins “pardonner” son côté parasite, elle émet un doux parfum d’œillet ou de clou de girofle, selon les nez ! Du fait de son habitat spécialisé, elle reste localisée sur le Parc et en Picardie. Profitons de cette éphémère “magicienne profiteuse” car elle va vite disparaître, sa floraison ne dure qu’une quinzaine de jours.

Texte et illustration : Philippe Carruette

En ce mois de juin, prairies et bas-marais basophiles du Parc sont recouverts de la floraison jaune des Rhinanthes à feuilles étroites (Rhinanthus angustifolius). Profitons de la parure d’or de cette plante annuelle de 10 à 50 centimètres de haut, aimant la lumière, et qui se fanera bien vite, surtout avec ces dernières journées chaudes. Elle doit son nom français au fait que sa fleur a l’apparence d’un nez (du grec rhinos, “nez”, et anthos, “fleur”). En anglais on la nomme du joli sobriquet de Yellow rattle, le “hochet jaune”. 

Comme toutes les espèces de la famille des Orobanches, les rhinanthes sont des plantes semi-parasites qui puisent dans les racines des voisines les nutriments – eau et sels minéraux – dont elles ont besoin ! Pratique (mais pas sympa…) quand on pousse en grand nombre dans un cycle très limité, sur un habitat restreint.

Texte et illustrations : Philippe Carruette

Les nouveautés s’enchaînent sur le Parc ces derniers jours, tant pour les oiseaux et les insectes que pour les orchidées. Un pied bien en fleurs d’Ophrys abeille (Ophrys apifera) vient d’être trouvé le long d’un chemin du parcours d’observation. C’est la première fois que cette espèce est inventoriée sur le Parc depuis sa création en 1973. Nous sommes plus habitués à rencontrer en ce moment dans nos marais les grandes orchidées violacées que sont les dactylorhizas, plutôt que cette adepte pionnière des larris calcaires. Mais elle peut s’adapter à des bois clairs et même des jardins ou des talus de bord de route. 

On la reconnaît à son labelle velouté, brun arrondi aux motifs jaunes clairs très variables. Sa forme, qui est celle de l’abdomen d’une abeille, attire ainsi les pollinisateurs qui croient trouver un partenaire avec qui se reproduire. Les mouvements désordonnés de l’insecte l’amènent à toucher les pollinies qui vont se coller à lui, permettant ainsi d’aller involontairement féconder une nouvelle fleur. Elle émet d’ailleurs une odeur – phéromone olfactive –  qui rappelle celle de la femelle d’abeille solitaire. Mais c’est aussi la seule du genre capable d’autogamie : quelques heures après l’ouverture de la fleur, les pollinies peuvent se dessécher rapidement et tomber sur le stigmate, pour le féconder.  Pratique quand on est pionnière dans un lieu ! En expansion, l’Ophrys abeille reste relativement localisée en Picardie, où elle est présente sur les coteaux calcaires de la Somme, de l’est de l’Oise et du centre de l’Aisne. 

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Benjamin Blondel, Cécile Carbonnier

A cette époque de l’année, des nombreux arbres et arbustes sont en pleine fructification. C’est l’occasion pour nous de découvrir de nouvelles couleurs le long des chemins, mais pas que !

Les argousiers, aubépines, fusains, troènes, nerpruns, ronces, ou encore les sureaux sont tous en fruits ! Une bien bonne nouvelle pour la migration post-nuptiale des passereaux non ?

Effectivement, chaque déplacement pour un oiseau a un coût énergétique plus ou moins élevé. Avant d’entreprendre une étape migratoire, les oiseaux doivent effectuer des réserves, qui seront stockées sous forme de graisse et converties en masse musculaire.

Chez certaines espèces, la masse corporelle d’un individu peut doubler avant le grand départ !

En Europe, il n’y a pas réellement d’oiseaux exclusivement frugivores, mais beaucoup s’y intéressent à une certaine période de l’année.
Au printemps et en été, c’est un complément rafraîchissant alors qu’à l’automne et en hiver, une ressource riche en vitamine. Les fauvettes, les grives, les merles, les mésanges, les rouges gorges, ou encore chardonnerets par exemple raffolent de ces petites boules colorées.

Et les fruits toxiques alors ? Aucune inquiétude à avoir, les animaux sauvages savent les reconnaître et les recracher s’ils en ingèrent par erreur. 

Un autre avantage des baies d’automne ? Tous ces petits gourmands vont alors participer à la dissémination des graines ingérées grâce à leurs fientes : l’ornithochorie.

Tout le monde y trouve son compte, une symbiose entre faune et flore.

 

Texte : Léa Coftier / Illustration : Alexander Hiley

Le Parc en cette fin de printemps est particulièrement riche au niveau botanique. Les prairies se tapissent du jaune des Rhinantes à feuilles étroites et du rose des Lychnis. Sur la dune, Vipérine, Ophioglosse, Erodium… sont en fleurs, alors qu’apparaissent les premières touches de jaune de l’Onagre bisannuelle. Profitons des orchidées des marais dont la floraison va être rapide. Trois espèces de Dactylorizas sont présentes au bord des chemins, avec leur belle floraison rose violette. Un pied d’Orchis pyramidal se développe mais commence déjà à faner. Son nom est dû à la forme conique de la fleur en début de floraison. Elle attire les pollinisateurs mais comme beaucoup de nos orchidées ne produit pas de nectar.  Au fond du parking ou à l’entrée du parc se sont les Orchis bouc qui se remarquent plus par leur taille que par leur couleur. Verdâtre terne elles se caractérisent aussi par un labelle torsadé jusqu’à 6 centimètres de long. Son odeur forte de bouc n’est pas toujours évidente et varie selon les milieux. 

 

Texte : Philippe Carruette / Illustation : Léa Coftier

L’automne s’accompagne d’un changement de menu chez de nombreux oiseaux. Merles, grives et rouges-gorges diversifient leur régime alimentaire, afin de pallier la raréfaction progressive des insectes et de leurs larves. Sur le Parc du Marquenterre, le choix proposé à la carte demeure varié : baies juteuses et fruits charnus garnissent l’assiette de nos amis à plumes. 

Parmi eux, un mets est particulièrement apprécié : la cenelle de l’Aubépine (Crataegus monogyna). Elle ressemble à une pomme rouge miniature, et renferme un noyau unique. Bien qu’insipide et farineuse, on lui prête de nombreuses vertus médicinales : véritable alliée du cœur, elle renforcerait sa capacité de pompage et calmerait les palpitations. De quoi permettre aux turdidés qui la consomment d’affronter l’hiver bravement !

Arbuste de légendes et de croyances, l’Aubépine doit son nom à la blancheur de son bois et de ses fleurs, qui s’épanouissent en mai, ainsi qu’aux nombreuses épines qui garnissent ses rameaux (alba = blanc, spina = épine). Ces armes défensives sont d’ailleurs estimées des pies-grièches, qui y empalent volontiers leurs proies, avant de les déguster sans autre condiment. Surnommée également “poire d’oiseau” ou “poire de oui-oui”, elle peut aisément atteindre 500 ans. C’est donc un arbre de choix pour garnir une haie, et offrir un restaurant pérenne à l’avifaune sauvage !

Texte et illustrations : Cécile Carbonnier