Enfin ! Ce lundi 10 avril, le premier Coucou gris a été entendu sur le Parc ! Toujours très régulier (comme une horloge), il s’est manifesté deux jours seulement avant l’année dernière (12 avril). L’oiseau nous est familier, notamment pour son chant particulier, mais le connaissez-vous vraiment ?

Un nom typique

Est-il vraiment nécessaire d’expliciter le sens du nom Coucou ? Car ceux qui l’ont déjà entendu sauront retrouver en ce terme l’imitation de son chant. L’adjectif « gris » se comprend aussi assez facilement au vu de son plumage.

En latin, on l’appelle Cuculus canorus. Le premier terme (prononcer « coucoulous ») se rapporte lui aussi à son chant. On peut noter que c’est de ce mot que dérive le mot « cocu », en référence au comportement « trompeur » de l’oiseau (mais nous y reviendrons). En latin, Cuculus peut aussi signifier « imbécile » et « fainéant ». Peut-être y a-t-il là aussi un lien avec ses mœurs particulières ?

Le terme canorus signifie sonore, mélodieux. Décidément, son chant marque vraiment les esprits !

Différentes formes

Le Coucou gris est… gris. Evidemment, me direz-vous. Mais, comme souvent avec les oiseaux, ce n’est pas si simple ! Il existe en fait deux formes différentes. La forme grise « classique » et une autre moins courante, dite « hépatique ». Ce mot se rapporte au foie (comme l’hépatite, maladie du foie), et fait référence à la couleur particulière que peuvent arborer certains individus. Cette comparaison reste légèrement exagérée. Le foie est rouge sombre alors qu’un Coucou dit hépatique est roux. Il s’agit d’une variation de plumage qui se retrouve surtout chez les femelles.

Un grand migrateur

Les premiers Coucous arrivent généralement début avril. Cela marque le début d’une (trop) courte période de quelques mois où leur chant résonnera dans nos campagnes. Mais dès août, les adultes s’en vont. Se nourrissant d’insectes, ils auraient bien du mal à se nourrir chez nous une fois l’hiver arrivé. Ils partent donc rejoindre des contrées plus hospitalières : les forêts tropicales d’Afrique.

Suite aux changements climatiques, on a pu noter un léger décalage dans les dates d’arrivée en Europe : on l’observe en moyenne 5 jours plus tôt que dans les années 60. Certains passereaux* au long cours (rousserolles, phragmites…) ont une date plus précoce d’environ 6 jours. Pour comparaison, les passereaux à migration plus courte (rouge-gorge, bergeronnettes…) ont vu leurs dates d’arrivée avancées d’environ 2 semaines !

Une reproduction particulière

Le Coucou gris et son cousin le Coucou geai sont les seuls oiseaux européens parasites. C’est-à-dire qu’ils pondent dans le nid d’une autre espèce. La femelle de Coucou gris cherche dans une grande zone les nids de différents passereaux en construction. Puis elle les surveille en attendant que l’hôte commence la phase de ponte. Sitôt que les parents s’absentent, la femelle Coucou va rapidement se poser sur le nid, enlever un œuf (pour éviter que les parents ne se rendent compte qu’il y en a un en trop) puis pondre le sien à la place. Si l’endroit est trop petit, elle peut déposer son œuf au sol puis le transporter dans son bec jusqu’au nid. De cette manière, elle peut pondre une douzaine d’œufs en quelques jours. Une femelle parasitera plutôt les nids de l’espèce qui l’a élevée.

Le poussin de Coucou naît après 12 jours de couvaison, souvent avant les poussins de l’hôte. Durant ses 4 premiers jours de vie, il éjecte du nid les autres œufs et poussins jusqu’à ce qu’il reste seul. Les parents adoptifs se concentreront alors sur lui pour le nourrir pendant environ 3 semaines, y compris quelques jours après avoir quitté le nid. Durant cette dernière phase, ses appels insistants et sa gorge colorée peuvent aussi attirer d’autres oiseaux. Un même poussin peut alors être nourri par plusieurs couples de différentes espèces.

Plus de 50 espèces peuvent être parasitées par le Coucou gris comme le rouge-gorge et même le troglodyte ! Cependant, suite aux décalages de dates de migration, certains oiseaux tendent à être de plus en plus parasités. C’est le cas de migrateurs au long cours tels que les rousserolles et phragmites. Comme les espèces migrant peu ou pas commencent leur reproduction plus tôt, le Coucou arrive trop tard pour en profiter. Il se rabat donc sur les oiseaux arrivant presque en même temps que lui. Ainsi, on constate un parasitisme 2,5 fois plus élevé sur la Rousserolle effarvatte que dans les années 1960.

*Le Coucou gris n’appartient pas à l’ordre des Passeriformes (communément appelé passereaux) mais à l’ordre des Cuculiformes. Ces ordres restent néanmoins assez proches sur différents plans. Les Coucous dépendent d’ailleurs de passereaux pour se reproduire.

Texte : Quentin Libert / Illustration : Estelle Porres