Parfois rares, souvent drôles, toujours de bon augure : découvrez ici les oiseaux qui nous ont rendu visite

Ça y est, la migration postnuptiale (de l’aire de reproduction vers l’aire d’hivernage) a commencé pour les oiseaux de la famille des Scolopacidés. Cette famille regroupe entre autres les barges, courlis, avocettes et chevaliers, qui sont des oiseaux limicoles : ils se nourrissent dans les milieux vaseux. La baisse des niveaux d’eau en été dans le Parc leur est favorable, puisque les vasières et zones dénudées leur servent de garde-manger et de reposoir.

L’oiseau qui nous intéresse aujourd’hui est un chevalier très reconnaissable à son comportement, qui lui a même valu son nom. Il s’agit du Chevalier guignette (Actitis hypoleucos) dont l’épithète vient du vieux français « guignier » signifiant « faire signe ». En effet, à l’arrêt ou même en se déplaçant, le Chevalier guignette hoche la queue de bas en haut, de manière assez rythmée, comme vous pouvez le voir sur cette vidéo : https://youtu.be/Z7LryW_11Hc.

Ce petit chevalier de 21 centimètres niche en juin dans les taïgas du nord de l’Europe, avant de descendre passer l’hiver en Afrique de l’ouest. C’est au cours de ses haltes migratoires dans les marais d’eau douce ou saumâtre européens que l’on peut l’observer. Au Parc, il est ainsi présent d’avril à mai puis de juillet à septembre, avec un maximum de 68 individus observés sur l’ensemble du site le 8 août 2021 !

Lors de vos promenades, n’hésitez donc pas à scruter les berges à découvert, à la recherche de ce chevalier en train de trottiner en quête de petites proies à glaner !

Merci à Jean Bail pour ses deux photos de notre sympathique rase-motte aux mœurs plutôt solitaires. Et si vous regardez attentivement, vous remarquerez que sur le premier cliché, il guette de son œil gauche un potentiel danger venu du ciel…

Texte : Solène Bischoff / Illustrations : Jean Bail, Solène Bischoff

Discrète, elle se faufile entre deux roseaux… pour venir se nourrir d’insectes et de graines sur une vasière en assec. Le moindre bruit, l’ombre d’un survol la font se réfugier dans la forêt aquatique qui se développe au pied du poste 4. Il faut dire que la Marouette de Baillon ne fait que 40 à 50 grammes, soit la masse d’un étourneau, et qu’elle passe sa vie dans la végétation palustre, sortant plutôt le soir. Mesurant à peine 18 cm, elle pourrait être confondue avec un autre membre de la famille des Rallidés, la Marouette poussin (Zapornia parva). Toutefois la Marouette de Baillon ne possède pas de rouge à la base du bec, contrairement à sa cousine. De plus, elle a des ailes courtes et des barres noirâtres et blanches assez importantes sous l’arrière de son corps.

C’est la première observation sur le Parc depuis 1973 (la 318ème espèce en 50 ans). Notre petite vedette est rare au niveau européen, avec une population extrêmement fragmentée estimée entre 760 et 3200 couples (Espagne, Roumanie, Russie, Ukraine…). Elle est d’ailleurs classée en Danger Critique (CR) sur la Liste rouge des oiseaux nicheurs en France métropolitaine (2016). Mais sa population est très mal connue ; l’atlas des Oiseaux de France 2000-2012 l’estime entre 0 et 7 couples ! Toutefois la discrétion de ce petit oiseau ne facilite guère ses contacts :  la Marouette de Baillon se faufile dans son milieu avec une extrême prudence, comme vous pouvez le voir sur la vidéo en lien ci-joint prise dans le Parc le 28 juillet : https://youtu.be/0liK-lMZDnM

De plus, sa présence en période de nidification ne peut être confirmée souvent que par des écoutes nocturnes de son chant aux notes sèches et très courtes – souvent comparé à un ongle grattant les dents d’un peigne – de faible portée (200 à 300 mètres). Il peut alors facilement se confondre avec celui des batraciens, eux aussi en plein concert à cette époque dans les scirpaies et cariçaies.

Une étude spécifique menée en 2021 par Benjamin Blondel, Tristan Guillebot de Nerville et l’équipe scientifique de Blanquetaque a permis la confirmation de plus d’une dizaine de mâles chanteurs en plaine maritime picarde. Une remarquable nouvelle, mais qui a demandé beaucoup de patience, de travail et de temps nocturne pour ceux qui l’ont réalisée ! En Camargue, Damien Cohez, conservateur de la réserve régionale de la Tour du Valat (et ancien guide du Parc !), a entrepris le même travail au printemps 2020, permettant de recenser 15 à 16 mâles chanteurs… alors que l’espèce était considérée comme rarissime dans ce haut lieu de l’ornithologie française.

Il s’avère que ce petit oiseau est depuis quelques années plus remarqué en France, ce qui, pour une fois, est une bonne nouvelle. Mais cela semble être pour beaucoup l’effet des sécheresses drastiques au sud de l’Espagne et du Portugal qui feraient remonter les oiseaux plus au nord. L’espèce a besoin de bas marais inondés certes à faible niveau d’eau (moins de 30 cm), mais l’aridité qui règne dès la fin de printemps rend nombre d’habitats défavorables. Les conditions hydrologiques sont donc un des facteurs essentiels au maintien de la marouette dans notre région. Migratrice, cette espèce hiverne en Afrique du Nord et au sud du Sahara.

Mais qui était Baillon ? Et bien cocorico ! Un naturaliste des Hauts de France ! Louis Antoine François Baillon (1778-1855) est né à Montreuil-sur-Mer (vallée de l’Authie, Pas-de-Calais) mais passe une grande partie de sa vie à Abbeville, où il meurt. Passionné de nature comme son père, il correspond très vite avec les « grands » de l’époque que sont Cuvier et Buffon. Il travaille quatre ans comme assistant au Jardin d’Histoire Naturelle de Paris (le futur Museum). Il publie la Flore du département de la Somme et s’intéresse à toute la faune locale. À l’époque, les espèces sont systématiquement prélevées et échangées entre passionnés et muséums d’Europe. En 1819, il envoie un rallidé inconnu, capturé en Picardie, à Louis-Pierre Vieillot, ornithologue de renom originaire de Seine-Maritime (hélas bien oublié). Celui-ci baptise cette nouvelle espèce Rallus bailloni notre fameuse Marouette de Baillon ! Mais le naturaliste allemand Simon Pallas avait déjà décrit l’espèce en 1804 ; elle gardera le nom de Porzana pusilla. Néanmoins le nom de notre naturaliste local est resté dans la dénomination française… et britannique – Baillon’s crake – le Brexit n’était pas encore d’actualité… !

La Marouette ponctuée est observée quasiment chaque année sur le Parc ; la Marouette poussin, quant à elle, n’a fait l’objet que de 3 observations (1990 et 2007) en 50 ans. 

Nota bene : Si vous voulez en savoir plus sur le nom des oiseaux, et ne pas oublier quelques-uns de ceux qui les ont observés bien avant nous – nous permettant de fonder notre passion ! – nous vous conseillons ce livre remarquable : L’étymologie des noms d’oiseaux de Pierre Cabard et Bernard Chauvet, aux éditions Belin.

Texte : Philippe Carruette, Florian Garcia / Illustrations : Florian Garcia

 

À la héronnière, le premier cigogneau a décollé le 8 juillet. Mais ce saut dans le vide a nécessité bon nombre d’heures d’exercices physiques… À 6 semaines, il a tout d’abord fallu se rendre compte que l’on a de longues et larges ailes, et apprendre à les étirer (jusqu’à 2,10 m d’envergure). Puis est venu le temps des premiers battements, ou : comment les faire fonctionner. Quelques jours avant le premier vol viennent les sauts sur le nid, de plus en plus haut, comme sur un trampoline, en battant de plus en plus des ailes pour développer une musculature, qui reste néanmoins peu impressionnante chez les oiseaux planeurs. Viendra enfin le premier vol qui devra être le bon pour l’aîné de la couvée ; les autres suivront à un ou deux jours d’intervalle. Fini le stade de poussin, les voilà juvéniles, reconnaissables au bec sombre prenant des nuances de rouge. 

Ces ados reviendront régulièrement sur le nid et y passeront chaque nuit. C’est le seul lieu où ils peuvent encore espérer se faire nourrir par leurs parents ! Au sol, tout est plus que nouveau par rapport à la vie arborescente à 20 mètres de haut. Ils devront tout apprendre, et comprendre : se familiariser avec le contact de l’eau, se baigner, identifier une proie potentielle par rapport à une herbe qui bouge au vent… L’inné sans l’apprentissage et la mémorisation n’aboutit qu’à une courte vie pour ceux qui la commencent. Beau vent à ces nouveaux migrateurs, dont l’année fut bien difficile, avec nombre de nids qui ont vu des adultes disparaître, des jeunes morts, et des conditions d’habitat qui se dégradent avec la disparition des prairies d’élevage…

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Jean Bail

Un Grèbe castagneux a installé son nid flottant juste devant la palissade d’observation entre les postes 6 et 7. Il est en pleine couvaison, quand une famille de Cygnes tuberculés s’approche tout près de lui pour se nourrir de plantes aquatiques : voisinage de taille impressionnante, mais sans danger pour le grèbe et ses œufs. 

Or le petit grèbe aime sa quiétude et quitte son nid pour plonger et attaquer par dessous, comme un sous-marin de poche, les grandes masses blanches ! Les cygnes adultes soufflent, sautent dans l’eau et regardent en permanence la surface pour savoir où la “torpille” va sortir. Que se passe-t-il sous l’eau ? À voir l’ultra réaction des cygnes, il est fort probable que le grèbe aille au contact en piquant plumes ou pattes des intrus ! Dès que la femelle cygne s’éloigne, le grèbe reste la tête immergée devant son nid pour surveiller le mâle encore à proximité. Entre-temps, il a pris un instant pour cacher ses œufs avec des algues vu que la confrontation dure. 

Il faudra vraiment attendre que la famille au complet de Cygnes tuberculés se soit éloignée pour que le castagneux continue sa couvaison. Juste pour rappeler : le Grèbe castagneux pèse 150 grammes (mouillé!) et le Cygne tuberculé 10 kilos !

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Maëlle Hello, Philippe Carruette

Les premières Spatules blanches juvéniles ont décollé de la héronnière le 24 mai. Comme à leur habitude, les adultes les amènent “découvrir le monde” dans les vastes prairies et marais d’eau douce du fond du Parc (selon les saisons, surtout au poste 3 et au poste 7). Cette année a lieu un peu de changement avec des regroupements d’oiseaux sur le plan d’eau en tout début de parcours, bien à découvert, le long des sentiers des visiteurs et des groupes scolaires. Certaines après-midis, ce sont jusqu’à plus de 40 oiseaux qui y sont posés ! 

Voilà une occasion rêvée pour une observation encore plus poussée du comportement des jeunes recrues ailées du Parc. Il est vrai que quand on est né à 20 mètres de haut dans une pinède, on a vraiment tout à découvrir ! Les premiers contacts avec l’eau que l’on touche délicatement, les premiers bains un peu submersibles dès que l’on a plus pied… pardon pattes, l’apprentissage de la quête de nourriture avec cet étrange bec rose qui donne un air “benêt”… 

Et puis les éternels harcèlements auprès des adultes afin de réclamer à manger en hochant la tête avec forces gazouillis de passereaux pour se faire remarquer. Les adultes cèdent bien (trop) souvent, et les petits peuvent récupérer dans la poche gutturale des parents une bouillie de nourriture plus ou moins digérée. Quand les parents refusent, jamais de violence, juste un refus de la tête, ou un sec coup d’aile semi-fermée. Pour, eux s’éloigner ne suffit surtout pas, leurs rejetons pots de colle les poursuivent à pattes ou en vol jusqu’à temps d’avoir satisfaction alimentaire ! 

Qu’est ce qui explique ces changements de lieu temporaire de repos ? Nul doute que les importants travaux de réouverture des milieux sur cet espace (6000 mètres cubes de sable et de vase veinés de rhizomes de phragmites ont été évacués !) ont favorisé le stationnement des oiseaux en général, qui  se sentent plus en sécurité. Sont-ce les mêmes couples qui prennent l’habitude d’aller chercher là des matériaux pour construire leur nid et qui y emmènent ensuite leur progéniture ? Les oiseaux étaient surtout présents l’après-midi lors des journées chaudes, ce plan d’eau s’avère aussi le plus proche des nids pour se rafraîchir. En tout cas, jamais de hasard, les spatules s’y trouvent bien et c’est certainement un des lieux de France où on peut observer dans de telles conditions cette espèce qui, certes en augmentation, reste localisée et symbole bien malgré elle des grandes zones humides préservées.

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Alexander Hiley

Aujourd’hui, nous vous proposons un texte original, poétique et engagé : le slam d’un de nos guides naturalistes, Jérémie Bernier, fervent admirateur d’un oiseau cher au Parc du Marquenterre… et qui est pourtant bien mal-aimé. Lisez, écoutez, appréciez !

Mort ou vif

La souffrance coule sur son visage comme l’eau ruisselle sur son plumage 

Il n’en méritait pas tant, le voilà qui erre sur les plages et les rivages 

Harcelé, détesté, refoulé mais quelle dette n’a-t-il donc pas encore payée 

Pourtant honnête et sage, le voilà accusé du plus grand braquage 

Recherché par toutes les autorités, une battue cette nuit est organisée. 

Les lampes torches et les chiens, les enquêteurs y ont mis les moyens 

Il trouve une cachette, sans toujours comprendre pourquoi contre lui ils s’entêtent 

La nuit progresse en même temps que la traque, plus ils approchent, plus monte le trac 

L’aube se pointe comme l’arme qui le braque, les sirènes retentissent, c’est la fin de la traque 

Bientôt la déferlante de questions, oppressé par des journalistes en mal de sensations 

Pourquoi avoir commis un tel génocide ? Quelles sont les motivations de cet infanticide ? 

Son esprit se perd et s’embrouille face à la pression qui s’est accentuée

Il ne sait plus vraiment son esprit est torturé, est-ce lui qui les a tous tués ? 

Le jugement commence demain avec des juges corrompus assermentés 

Le public convaincu de sa culpabilité attend de le voir tomber 

Enfin le début de l’audience, terrorisé par les huées, il prend place sur le banc des accusés 

Entre bientôt le premier témoin, un homme de mer habitué aux vents marins 

Placé devant les jurés, il jure de dire la vérité, rien que la vérité 

L’assemblée boit ses premières paroles, on sent que le mensonge est bien ficelé 

Les heures passent comme les témoins qui peu à peu scellent son destin 

Puis le vent tourne et lui laisse une petite chance 

Un témoignage qui viendrait prouver à tous son innocence 

Notre oiseau noir espère en tremblant, il sent sonner en lui la délivrance 

Un poisson entre au tribunal en symbole d’une dernière corde à son arc 

Mais rires dans la salle quand ce dernier reste muet comme une carpe 

Dévasté, il sait que plus rien ne peut désormais le sauver 

Les juges rendent leur verdict, sans surprise, il est condamné 

Écoeuré de ce monde d’hypocrites aveugle de la vérité, il attend d’être exécuté 

Au fond de sa cellule abattu, il patiente sa peine 

Malheureux de voir cette société lui faire autant de peine 

Voilà le jour J, les ailes et le cou attachés sur un poteau 

Braqués sur lui sont les fusils et les appareils photo 

La trompette sonne et cinq coups de feu retentirent, pour soi-disant lui permettre de se repentir 

Et c’est ainsi le cœur innocent et le corps mourant que s’en alla le Cormoran.

Texte : Jérémie Bernier / Illustration : Alexander Hiley

Cet article a été rédigé avant l’épidémie d’influenza aviaire (H5N1) qui touche de nombreuses populations d’oiseaux sur notre littoral depuis la fin du mois de mai, notamment les colonies de Sternes caugek, pour lesquelles nous sommes particulièrement tristes et inquiets. 

Depuis le mois d’avril, une colonie de Sternes caugeks s’est installée sur le Parc, au poste 1. De plus, de nombreuses migratrices ont pu être régulièrement observées sur les bancs de sables du poste 3. Il s’agit d’un lieu privilégié de repos dans leur longue migration qui les amènera du sud de l’Afrique jusqu’à la Scandinavie. Nicheuse ou migratrice, la Sterne caugek est donc une habituée du Parc que l’on observe facilement.

Néanmoins, le 26 mai dernier a été particulier pour les sternes. En plus de notre chère caugek, ce sont 3 autres espèces de sternes qui ont pu être observées ce jour-là !

Sterne naine (Sternula albifrons)

La première surprise de la journée est une Sterne naine posée sur les bancs de sable du poste 3. Les caugeks semblaient géantes à côté de cette toute petite sterne ! Tout comme ses cousines autour d’elle, elle s’est arrêtée sur le Parc afin de faire une pause dans son voyage. Malgré sa petite taille, elle reste néanmoins une grande migratrice. Elle passe l’hiver en Afrique de l’Ouest, comme au Sénégal ou en Mauritanie. Au printemps, elle remonte en Europe, certaines jusqu’en Ecosse ou au sud de la Suède. Un trajet de plus de 5 000 km pour un oiseau de 40 grammes ! Elle fait régulièrement des haltes le long des côtes afin de se reposer et de manger. L’individu vu au Parc nous a d’ailleurs gratifié d’un joli spectacle en pêchant sur le plan d’eau sur lequel il se reposait !

Sterne pierregarin (Sterna hirundo)

En début d’après-midi, sur ce même îlot, une nouvelle sterne est repérée. Il s’agit de la Sterne pierregarin. Un peu plus grande que la Sterne naine mais toujours plus petite que la caugek, elle arbore des couvertures alaires plus sombres. Tout comme la Sterne caugek, elle passe l’hiver dans le sud et l’ouest de l’Afrique puis se reproduit en Europe, jusque dans les côtes nord de la Scandinavie. Cette sterne niche dans des milieux variés mais affectionne tout particulièrement les zones rocheuses, comme l’indique son nom : “pierregarin” est la forme contractée de “pierre” et de “garer” (au sens de rester, habiter). On la retrouve donc entre autres sur des bancs de galets et des îlots rocheux.

Sterne arctique (Sterna paradisaea)

En toute fin de journée, alors que nous cherchions la Sterne pierregarin pour une dernière observation, nous sommes tombés sur un individu. Mais quel étrange individu ! En effet, il s’agissait d’une Sterne arctique ! Les deux espèces sont très proches physiquement. La Sterne arctique se démarque par son bec plus court et entièrement rouge (pas de pointe noire comme chez la pierregarin) et le noir de la nuque descendant moins bas que chez sa cousine. Mais surtout, ce sont ses pattes très courtes : on les devine à peine quand elle est posée ! Heureusement pour elle, ce n’est pas son meilleur atout. Celui-ci réside dans son aptitude à voler. Encore plus que les espèces précédemment citées, il s’agit d’une très grande migratrice. Elle passe la moitié de l’année au pôle Nord et l’autre moitié… au pôle Sud ! Elle suit ainsi le soleil et le jour. L’hiver au pôle étant une nuit quasiment continue, le plancton disparaît, et les poissons s’en nourrissant aussi. La sterne migre alors vers le pôle opposé pour retrouver des journées longues, ensoleillées et surtout des eaux poissonneuses.

Texte : Quentin Libert / Illustrations : Nathanaël Herrmann, Léa Coftier, Florian Garcia, Lucie Ligault

À chaque saison ses espèces emblématiques, et nos deux couples de Bihoreaux gris n’y dérogent pas encore cette année ! Mais tout d’abord commençons par une petite description de cet oiseau aux mœurs très discrètes.

Le Bihoreau gris, aussi appelé Héron bihoreau gris, est une espèce appartenant à la famille des Ardéidés, couramment nommés échassiers. Le bec en forme de poignard en est d’ailleurs un très bon exemple. Mais on peut noter également l’allure assez trapue, comme ramassée, et des pattes courtes.

Le plumage de l’adulte est relativement facile à identifier. Le haut de la tête (la calotte) ainsi que le dos sont noirs, les ailes et la queue grises, le ventre blanc, et les pattes jaunâtres. On peut également noter en période de reproduction les deux longues plumes blanches sur la nuque. Le plumage des jeunes est beaucoup plus brun rayé et, en vol, peut parfois être confondu avec le Butor étoilé.

Dans les récits historiques, Georges-Louis Leclerc de Buffon (1707-1788), un éminent académicien des sciences, nous rapporte quelques faits concernant la façon dont était perçu le Bihoreau gris à son époque. Il dit notamment : « La plupart des naturalistes ont désigné le bihoreau sous le nom de corbeau de nuit (Nycticorax nycticorax) et cela d’après l’espèce de croassement étrange, plutôt de râlement effrayant et lugubre qu’il fait entendre pendant la nuit. »

Il est vrai que d’une nature habituellement silencieuse, il peut néanmoins pousser des cris en vol qui rappellent ceux émis par les corvidés.

Chez les hérons, c’est le seul qui a un comportement plutôt nocturne. Le jour il dort perché sur la branche d’un arbre, bien à l’abri dans la végétation dense. Le fait qu’il soit actif de nuit a sûrement joué dans son appellation. Les moments où l’on peut observer les Bihoreaux gris de jour sont donc assez limités. La période la plus favorable se situe au printemps, au moment de la reproduction.

Le Bihoreau gris a un régime alimentaire assez varié qui est composé entre autres d’insectes, de micromammifères, de petits poissons… Il est d’ailleurs très friand des amphibiens et de leurs têtards.

Pour attraper ses proies, il va se mettre en affût le long des berges des zones humides contenant une végétation très dense. Souvent camouflé à l’ombre,  personne ne peut le remarquer et l’instant de surprise est total !

Le 18 avril déjà, trois adultes avaient été observés posés dans les pins Laricio situés à gauche de la héronnière, confirmant une nouvelle fois leur intérêt pour ce lieu de nidification particulièrement favorable. Les 18, 19 et 24 mai, les observations sont régulières car les adultes sont considérablement actifs sur le transport des matériaux pour les nids. Mais ils n’hésitent pas également à se percher dans les alentours. Comme c’est le cas d’ailleurs sur la vidéo en lien Youtube qui a été prise au poste 13. Nous y voyons un magnifique adulte qui nettoie son plumage, l’air complètement serein.

https://youtu.be/Nm6G5QpBpVk

La femelle va pondre entre 3 et 5 œufs avec 2 jours d’intervalle. L’incubation dure environ entre 21 et 23 jours. Comme chez la plupart des oiseaux, même quand les oisillons sont nés et qu’ils grandissent, les parents continuent d’apporter des éléments pour perfectionner les nids. Les jeunes y resteront 3 semaines puis commenceront à grimper sur les branches des environs… avant de finalement prendre leur premier envol au bout de 6 à 7 semaines. Ils obtiendront leur maturité sexuelle à l’âge de 2-3 ans. La durée de vie d’un Bihoreau gris est en général d’une dizaine d’années, même si on a déjà observé des individus vivant jusqu’à 16 ans !

Évidemment nous allons continuer à suivre avec attention les relais réguliers des adultes des deux couples. Nous nous retrouverons un peu plus tard dans la saison pour donner des nouvelles des futurs jeunes ! 

Texte et illustrations : Florian Garcia