Nom d’un coléo !

Aujourd’hui, nous vous proposons de partir à la rencontre de trois coléoptères qui résident au Parc du Marquenterre : Phymatodes testaceus, un longicorne aux fémurs renflés qui raffole de bois mort  ; Thanatophilus rugosus, un silphe découvert fin mars sur le site, une première mention pour la région ; et Clytus arietis, encore un longicorne qui, lui, aime se déguiser en guêpe. A priori, ces trois insectes n’ont pas grand chose en commun. Et pourtant : voici les lauréats du concours du nom vernaculaire le plus improbable !

Le Calleux chauffagiste (Phymatodes testaceus)

Ceci n’est pas un juron de Haddock, mais le sobriquet d’un petit capricorne tout allongé mesurant entre 6 et 16 mm, tantôt jaune orangé, tantôt bleuté, parfois même bicolore. Comme la plupart des membres de sa famille, il possède de longues antennes atteignant approximativement  la longueur du corps. On le reconnaît à ses fémurs élargis qui donnent l’impression qu’il fréquente assidûment les salles de sport. Pourtant ce mangeur de bois mort – ou saproxylophage, pour employer un gros mot – préfère les forêts de feuillus, et se retrouve parfois transporté jusque dans les maisons via les bûches destinées à nos cheminées. Mais pas de panique ! Le chauffagiste n’éprouve aucune attirance pour le bois écorcé. Il ne lui viendrait donc jamais à l’idée de se servir effrontément dans les poutres des charpentes, les lattes de plancher ou les armoires normandes… 

Le Bouclier noir chiffonné à corselet raboteux (Thanatophilus rugosus)

En voilà un nom à rallonge ! Et un brin pompeux… Peut-être est-ce pour compenser un binôme scientifique peu flatteur ? En effet, ce silphe est littéralement « l’ami ridé de la mort » : un être fasciné par les cadavres, aux pulsions effrayantes… Mais qu’est-ce qui lui a valu une telle réputation ? Ce mignon petit insecte tout noir, à la bouille couverte de poils orangés et au corps ponctué de rugosités brillantes, serait-il adepte de rituels sataniques ? Que nenni. Comme tous les membres de sa famille – les Silphidae – il nous rend un grand service en se nourrissant le plus simplement du monde de matière organique en décomposition. Sans lui et ses autres copains nécrophages, nous serions entourés de macchabées ! Remercions donc chaleureusement notre charmant bouclier. Et pour les plus pressés, vous pouvez l’appeler Silphe perlé, il se reconnaîtra.

Le Clyte d’Eastwood (Clytus arietis)

Eh non, ce n’est pas une blague ! Pour preuve, ce lien très sérieux vers le site du Muséum national d’histoire naturelle, LA référence pour connaître le nom des petites bêtes qui nous entourent : https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/12380. Ce joli longicorne aux rayures jaunes et noires est l’homonyme – à une prononciation bancale près – de l’acteur-réalisateur américain à la gâchette facile. Un nom donné sûrement par un entomologiste féru de westerns spaghettis… et de calembours. Comme son cousin le chauffagiste, il se nourrit de toutes sortes de bois morts. Au printemps, on le voit galoper tel un cowboy sur les grumes, les souches et, quand il est d’humeur romantique, sur les ombelles des fleurs. Sacré Clint !

Alors, qui a dit que l’entomologie était une science ennuyeuse ? 

Texte et illustrations : Cécile Carbonnier