Parfois rares, souvent drôles, toujours de bon augure : découvrez ici les oiseaux qui nous ont rendu visite

Le mardi 21 juillet, par une belle fin d’après midi ensoleillée et un léger vent de Nord Ouest, quatre jeunes cigognes noires survolent le parc. Profitant de ces bonnes conditions, elles filent plein Sud, sans s’arrêter, direction le nord du Burkina ou le Niger (destination finale d’hivernage). 

Les oiseaux ont tendance à passer de plus en plus tôt en migration postnuptiale, avec un pic d’observation se décalant fin juillet (au lieu de mi août dans les années 90) et maintenant une quasi absence de données en septembre.

Les cigognes noires remontent de plus en plus tôt sur leur site de reproduction dans le Nord Est de la France (elles nichent dans l’Aisne), les Ardennes belges et l’Allemagne. En effet, les juvéniles, qui sont majoritaires à l’ouest de notre couloir de migration, s’émancipent donc plus tôt.

Il sera peut être encore possible d’observer des individus à la traîne, car les données les plus tardives sur le parc sont le 17 octobre 2016 et le 10 novembre 2014 ! Ouvrons l’œil !

Finalement trois de ces jeunes (non bagués) ont choisi de passer la nuit sur le parc entourés de vastes vasières et de prairies. Le matin du 22 juillet à 10h, elles ont survolé le pavillon d’accueil et la file d’attente des premiers visiteurs, un spectacle magique ! 

Bon voyage !

Photo du 21 juillet en fin de journée

Texte : Philippe Carruette / Illustrations : Nicolas Deledicq (22 juillet en fin de journée) et Eugénie Liberelle

C’est parti, les jeunes cigognes après s’être bien entraînés sur le nid en faisant du « trampoline » ont pour la plupart quitté le nid. L’atterrissage n’est pas encore parfait et la maîtrise du vol plané pas encore optimale mais le résultat est prometteur.

Posé au sol, si se nourrir est inné pour les juvéniles, il faut quand même apprendre (on peut bien être doué mais si on ne travaille pas…). Il est intéressant de voir ainsi les cigogneaux au pied de la héronnière harponnant une écorce de pin, une tige de graminée qui bouge au vent, ou s’énerver sur une branchette feuillue d’argousier. Eh oui quand on niche à 25 mètres du sol tout est nouveau sur le plancher…des cigognes ! Et je ne vous dis pas quand on arrive dans le marais au contact de l’eau !

Profitons de les observer au maximum ; ces juvéniles au bec sombre et au plumage neuf, dans quinze jours elles seront sur la route de l’Espagne et du Portugal. Seuls, sans les parents qui eux vont migrer en août-septembre après avoir fait leur mue. Certaines cigognes passeront peut être Gibraltar et gagneront le Mali, le Niger ou la Mauritanie. Et bien peu hélas reviendront dans notre région !

 

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Alexander Hiley

Si les colonies de Laridés des postes 2 et 6 ont été en partie détruites, la colonie du poste 1 prospère notamment avec les 254 couples de Mouettes mélanocéphales. Cette espèce a la particularité de laisser se réunir ses grands poussins en crèche sans aucune agressivité des adultes. Ces dernières semaines ce sont ainsi plus de 200 grands poussins et juvéniles gris-argentés qui sortent de la végétation de l’îlot principal pour se baigner ou se dégourdir les pattes sur les plages de sable et les vasières (fini le confinement, c’est l’été!!!). Profitons bien de leurs observations, car ces juvéniles vont partir très vite en groupe, direction Le Portel près de Boulogne sur Mer qui sera leur premier regroupement postnuptial. Ensuite elles prendront la route de la Manche, du Finistère et pour certaines jusque dans les Asturies espagnoles ou le sud du Portugal. A l’inverse les jeunes Mouettes rieuses plus « rouquines » se regroupent peu, restant seules entre jeunes de la même famille, évitant le contact avec les adultes agressifs de l’entourage de la colonie.

 

Texte : Philippe Carruette / Illustration : 

Le fait a vraiment le mérite d’être mentionné puisque le site âgé de 47 ans avec 308 espèces d’oiseaux observées (n’oublions pas, que sur 200 hectares !) n’a pas souvent l’occasion de vivre des nouveautés ! Un mâle de Pie-grièche écorcheur est repéré le matin du 22 juin 2020 par l’équipe de la Réserve Naturelle lors de son passage pour gagner le littoral. L’après midi une observation plus longue permet de repérer un couple de pie-grièche qui fait le va et vient entre une zone d’argousiers et un sureau où le nid avec des jeunes est sûrement présent, le pic des éclosions se situant dans les deux dernières décades de juin.

Le mâle est observé en train d ’empaler  une cétoine sur une épine d’argousier! Comportement « mythique » vu dans les livres que nous savourons ! Un abdomen de hanneton est aussi accroché un peu plus loin. Ce comportement de lardoire montre que les proies sont abondantes. Le territoire n’est pas choisi au hasard…. Une zone très ensoleillée et sèche, un vaste massif d’argousiers, une prairie et une friche à talus enherbé sont caractéristiques de l’habitat avec de nombreux insectes. Les études de trois anciens guides du parc (Alexandre Laubin, Guillaume Canova et Matthieu Robert ) qui ont découvert et suivi une population relicte dans la Somme d’une quinzaine de couples en « micro colonie » au sud de la baie de Somme. Ces observations ont bien ciblé ces milieux toujours secs et bien ensoleillés avec des buissons épineux, en majorité des aubépines, en basse vallée de la Somme. Malgré nos prospections dans des milieux jugés favorables à cette époque aucun couple n’avait été noté dans le Marquenterre, et à priori la dernière mention dans notre secteur est un couple nicheur à Saint Quentin en Tourmont en 1997.

Cette espèce n’avait été notée que 3 fois sur le parc depuis 1973 à des dates de migration postnuptiale de plus très tardives pour les deux premières : le 2 octobre 1994 et le 2 octobre 2011 et un juvénile le 7 août 2018.

La Picardie est en limite nord ouest de son aire de répartition. Ce n’est vraiment que dans l’Aisne, notamment en Thiérache, qu’elle est encore bien présente mais fortement menacé par le déclin de l’élevage…

 

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Léa Coftier

Le Circaète Jean le Blanc se reproduit dans le Sud de l’Europe surtout en Espagne, le nord de l’Afrique, la Turquie et de la Pologne à la Sibérie. 2500 à 3300 nichent en France en 2012 avec une tendance à l’augmentation. L’hivernage est en Afrique dans la zone sahélienne.

Ce petit aigle mangeur de serpents était déjà noté au 19ème siècle sur notre littoral  » l’Aigle Jean le Blanc, excessivement rare, se tue quelque fois dans les garennes de Saint Quentin en Tourmont, embouchure de la Somme  » (Cocu 1933).  » Le Jean le Blanc paraît en automne au-dessus des garennes allant rapidement au sud et au printemps se dirigeant vers le nord, ce qui ne l’empêche pas de manger quelques lapins…  » (Labille, 1858)

De 1973 à 1990 une seule observation exceptionnelle a lieu sur le parc  (la première contemporaine pour notre littoral) de ce rapace mangeur de reptiles : 1 le 25 septembre 1990 en vol stationnaire au-dessus de la pinède avant de partir plein sud. Il ne sera pas revu les jours suivants.

En 2013 un oiseau à la tête sombre est photographié le 13 juillet et, est revu le lendemain. Le 21 juillet un deuxième individu à la tête claire est photographié, la mue et le pattern montrent bien qu’il est différent du premier. Ils seront alors identifiés comme des oiseaux immatures.

Une observation remarquable pour sa date tardive même très tardive d’un individu photographié le 6 novembre 2014.

Le 23 juillet 2016 un oiseau est observé chassant sur les prairies du parc sans suite les jours suivants.

Un individu en phase claire (pattern représenté seulement chez 10% de la population) est observé au moins du 16 juin au 17 juillet sur le parc chassant sur les prairies et surtout vers le nord du massif dunaire. C’est la première observation sur les lieux, d’un stationnement prolongé. Quel est le régime alimentaire de l’espèce sur un littoral où les reptiles sont quasi absents (arrivée récente de la Couleuvre à collier sur la basse vallée de la Maye à Rue), et le Lézard vivipare s’il n’est pas rare reste localisé sans forte densité?

Le 23 juin 2020 a lieu une nouvelle observation d’un oiseau de pattern clair photographié par Denis Atinault, avec une photo très intéressante en compagnie d’une Buse variable. L’oiseau présente un début de mue des rectrices.

On constate que les observations se concentrent en été concernant des oiseaux immatures (l’espèce niche à 3 ou 4 ans). La tendance à l’expansion sensible vers le nord (nidification en forêt de Fontainebleau), la tendance à des périodes estivales chaudes, l’arrivée des reptiles et les travaux d’ouverture des milieux dunaires par le Syndicat Mixte Baie de Somme pourraient favoriser l’espèce et multiplier la régularité des observations dans notre région. 

 

Texte : Philippe Carruette / Illustration : Denis Atinault

Le 18 mai, depuis les roselières en extension sur le parc, résonnent les symphonies plus ou moins harmonieuses des passereaux paludicoles du site : Rousserolles effarvattes ou verderolles, Bruant des roseaux ou Phragmites des joncs sont en concert même si hélas bien peu de personnes en profites !  Au pied du poste 4, un chant puissant et grinçant laisse à penser à un rainette plus mélodieuse ou une Effarvatte bien enrouée. Un superbe mâle de Rousserolle turdoïde chante bien en évidence au sommet d »un roseau. C’est la plus grosse des rousserolles  européennes (plus de 30 grammes et une vingtaine de centimètres soit le double de sa cousine effarvatte) et son bec fort est caractéristique. Elle recherche normalement les vieilles phragmitaies très inondées avec des roseaux à fort diamètre (supérieur à 6mm). Cette espèce est en net déclin en France avec 2000 à 3000 couples nicheurs en 2012 ce qui est bien peu pour un passereau. Ce ne fut pas toujours le cas. Ainsi en Picardie  la population était estimée à 250 couples en 1987 , chutant entre 40 et 60 en 1995, puis plus que de rares chanteurs isolés dans l’Aisne ou l’Oise dans les années 2000. Sur le parc cette espèce n’ a été notée que deux fois en 47 ans : un chanteur le 17 mai 1985 et un oiseau bagué le 31 août 2015 en migration postnuptiale. C’est une grande migratrice qui nous quitte dès fin août pour gagner le sud du Sahel jusqu’en Afrique du Sud. Ce chanteur peu discret est de nouveau bien présent le 25 mai. Son attitude à la vigilance exacerbée à la vision du moindre passereau dans la phragmite montre que on a hélas affaire pour l’instant à un mâle encore célibataire !

Au lever du jour des cris de contact aigus, à peine audibles, s’entendent au-dessus des maisons… Il s’agit des Pipits farlouses en pleine migration. Repérés dans un ciel bleu avec les jumelles, leur vol bondissant en groupe dispersé le confirme. Plus tard c’est au tour des Goélands bruns. Leur grandes envergure aux ailes fines, les fait plus facile à repérer cette-fois-ci, eux aussi, en provenance d’Afrique, ont entamé leur grand voyage vers les régions nordiques. Ils ont les ailes gris foncées et le ventre blanc immaculé. Contre un ciel bleu le contraste des couleurs est splendide ! En fin de matinée dix Spatules blanches survolent Arry, un village en arrière littoral. Elles tournent sur une colonne d’air chaud avant de « glisser » doucement vers le nord. Nul besoin d’être à la campagne pour créer son propre « spot » de suivi de migration. Ces observations ont été signalées la semaine dernière à Rue, Abbeville, et au centre-ville d’Amiens… Poussées par le besoin de retrouver au plus vite les meilleurs territoires de reproduction, des milliers d’oiseaux migrateurs filent vers le nord survolant notre territoire. Pour profiter du spectacle, il suffit de lever les yeux…

Mais comment sait-on que le Héron cendré en vol lent et régulier au-dessus de notre maison, appartement, ou studio est en migration et pas simplement en train de faire ses « courses de première nécessité » au bassin du voisin ? Comment sait-on que la Buse variable qui tourne en altitude a mis le cap sur la Scandinavie et n’est pas juste un oiseau « local » en train de se dégourdir les ailes ?

 

 

 

Il faut déjà prendre en compte les conditions météo. Grand soleil, ciel bleu, températures élevées.. Le beau temps continue à nous narguer en ce moment. Et on ne peut même pas en profiter ! Nul besoin alors d’écouter les prévisions ! Pas si vite! Mettez-vous dans la tête d’un oiseau. Après tout, pour eux la météo joue un rôle crucial dans leur survie… voilà une bonne raison d’écouter Evelyne Dhéliat jusqu’au bout ! Ce beau temps printanier est synonyme de migration. Alors c’est parti pour guetter au ciel depuis votre balcon, fenêtre ou transat (pour les plus chanceux!).

Si un ciel dégagé permet aux oiseaux de mieux se repérer aux traits de côtes, vallées, fleuves (ou la lune et les étoiles pour les migrateurs nocturnes), encore faut-il surtout que le vent soit bien orienté pour économiser un maximum d’énergie.  Nul doute qu’un vent de dos est  plus propice pour migrer efficacement. Logique. Faire du vélo avec un vent de face est moins rigolo, non ! Cependant, par vent de sud les oiseaux risquent de voler très haut, à peine perceptibles même avec une paire de jumelles puissantes. L’altitude moyen d’un vol migratoire se situe entre 800 et 1500 mètres !

L’observation de la migration active est rendu plus facile par un vent de face (est ou nord-est au printemps, sud ou sud-est à l’automne). Les oiseaux volent plus bas, et sont donc plus visibles, car la vitesse du vent est freiné par les obstacles au sol. Les « spotteurs » aux sites de suivi en Baie de Somme raconteront les matinées avec des milliers d’hirondelles et de martinets qui passent à toute vitesse « dans les cheveux » par vent nord-est. En général les journées pluvieuses sont à éviter. Tous, sauf les migrateurs les plus robustes et de rares espèces comme les tarins,  s’accorderont une petite pause et évitent de lutter contre les éléments. Ils continueront leur périple dès la prochaine accalmie.

N’oubliez pas de mettre votre réveil ! Certes c’est bien dur de se motiver à se lever tôt pendant le confinement mais, comme le dit le proverbe anglais, « the early bird catches the worm » (traduction: « l’oiseau qui se lève tôt capture le premier vers » ou plutôt « le jour appartient à ceux qui se lève tôt ») ! Et puis on fera la grasse matinée… demain !    Le meilleur créneau pour observer la migration est dès le lever du jour.  Après quelques heures de vol, en mi-matinée, le flux ralentit. Une pause ravitaillement s’impose pour la plupart des migrateurs. Leur voyage reprendra le lendemain ou même à la tombée de la nuit. Si vraiment vous n’êtes pas matinal, rassurez-vous, vous n’êtes pas le seul ! Rapaces et cigognes ne commencent à s’activer qu’à partir de la fin de matinée quand l’air est réchauffé et les ascendances thermiques leur permettent de planer avec beaucoup plus de facilité. Hirondelles et martinets peuvent aussi continuer leur migration toute la journée. Adaptés à se nourrir en plein vol il ne sont pas obligés de s’arrêter pour « refaire le plein » à l’inverse des autres grands voyageurs.

A vous de jouer alors. Prenez un thé, café, ou même un petit apéritif ou une bière locale (toujours avec modération… pour les migrateurs de l’après-midi !), positionnez-vous face au sud, carnet et jumelles en main. « Balayez » le ciel et essayez de repérer les oiseaux qui passent. La séance d’observation peut démarrer ! Observez, notez, laissez-vous emporter par la magie de la migration des oiseaux… le confinement devient loin.  Pourquoi ne pas se fixer un créneau tous les matins ? Au fil des jours la diversité d’espèces va évoluer. Vous serez sans doute étonné par tout ce qui passent au-dessus de chez vous….

 

 

 

Le 21 février 2020 nous observions avec Jean Claude et Armelle Guillo un Faucon pèlerin en train de se nourrir sur un cadavre ancien de Goéland marin. Un comportement déjà exceptionnel pour ce rapace qui, après recherches et contacts avec les spécialistes de l’espèce, n’est vraiment pas du tout du genre charognard. Cela s’expliquait par les 6 semaines de vent qui ont  gêné la chasse au vol du rapace. 
 
Mais la surprise fut double, puisque ce mâle adulte (que l’on avais au départ identifié comme femelle adulte,  vu sa taille et morphologie … oups !)  était porteur d’une bague couleur rouge avec deux PP blanc et une bague métal Museum Stockholm  de couleur mauve. Grâce à la persévérance de Jean Claude Guillo l’origine de l’oiseau fut finalement trouvé. Il a été bagué poussin (le dernier à droite sur la photo de la nichée, le plus beau, vous pouvez pas vous tromper !) le 23 juin 2014 à Hudiksvall au centre de la Suède sur le littoral à 300 km au nord de Stockholm. Il a été revu au sud de la Suède sur l’île d’Oland en août 2014 puis plus aucune nouvelle ! Le bagueur Stig Norell nous a envoyé deux sympathiques photos du baguage où on distinguait bien les deux jeunes femelles plus grosses et les deux mâles dont « PP gros pépère » . Au moins quatre Faucons pèlerins différents (une femelle adulte à la poitrine très blanche, un petit mâle, une femelle immature et PP) ont été observés sur le parc cet hiver.
 
 
Depuis 1973, nous avions déjà observés deux Faucons pèlerins porteurs de bague couleur sur le parc, dont un seul avait été identifié  comme bagué dans le nord est de l’Allemagne. L’espèce niche sur les falaises calcaires maritimes de la côte picarde et normande et de plus en plus dans les Hauts de France et en Belgique, en ville sur des bâtiments ou sur des lignes à moyenne tension dans des vieux nids de corvidés.  
 
Merci vraiment à Stig Norell pour le baguage de cet oiseau et les sympathiques photos qui nous rapprochent… !