Quand l’étrépage dévoile des merveilles

Sur les chemins du petit parcours, une plante bien discrète a fait son apparition. Modeste touffe verte au ras du sol, elle forme une jolie souche circulaire gazonnante où s’exprime une multitude de tiges, au bout desquelles on aperçoit une délicate inflorescence brune. Du haut de ses 10 centimètres, voici le Scirpe penché (Isolepis cernua). Petit, mais exigeant ! Pour se développer, il nécessite un sol pionnier, sur un substrat sableux humide ou tourbeux, avec un pH élevé et oligotrophe, c’est-à-dire assez pauvre en nutriments.

En Hauts-de-France, il n’avait pas été observé pendant de longues années et semblait proche de l’extinction régionale. Récemment, une petite station a été découverte dans le marais de Cambron à l’ouest d’Abbeville, une autre dans les marais de Saint-Josse, ainsi qu’une importante population dans la Réserve naturelle de la Baie de Somme, essentiellement sur l’Anse Bidard.

S’il est arrivé au Marquenterre, ça n’est pas un hasard. Cet hiver, sur le petit parcours, l’équipe d’entretien du Parc a procédé à des opérations d’étrépage. Ces travaux de gestion consistent en la suppression de la couche superficielle du sol, sur quelques centimètres. La terre, ainsi mise en lumière et débarrassée d’une épaisseur riche en matière organique, permet donc l’expression de plantes pionnières oligotrophiles ; des graines, en dormance dans le sol depuis parfois plusieurs décennies, trouvent alors les conditions adéquates pour sortir d’un long sommeil ! Sur le territoire national, cette flore particulière est généralement menacée, car la réunion de ces conditions est devenue bien rare. Comme quoi, cela a du bon parfois de faire tabula rasa !

Texte : Benjamin Blondel, Cécile Carbonnier

Illustrations : Cécile Carbonnier